19 juin 2011 ALBI cathédrale Sainte Cécile
Article proposé par Elisabeth BART
Photos de Jean-Nicolas BART
et Gérard Beaumont
La cathédrale Sainte-Cécile d’Albi
La cité épiscopale d’Albi, « un ensemble urbain exceptionnel »….
La cathédrale Sainte-Cécile, « la plus grande cathédrale de brique au monde », où se trouvent « le plus grand Jugement dernier du monde » et « les plus grandes orgues classiques de France »…
Tous ces records rappelés par les guides touristiques intriguent, mais ne suffisent pas à rendre compte de la beauté de cet édifice, joyau d’une cité épiscopale classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, plus riche en monuments que Sées, notre cité épiscopale ornaise : l’ancien palais épiscopal, le palais de la Berbie(XIIIe-XIVe) qui abrite désormais le musée Toulouse-Lautrec, la collégiale Saint-Salvi et son cloître (X-XIIIe) se dressent toujours dans toute leur splendeur.
La cathédrale Sainte-Cécile fut implantée dans la cité pour lutter contre l’hérésie cathare. Il aura fallu exactement 198 ans pour la construire, ni plus, ni moins, de 1282, date des fondations du chœur, à 1480, année de sa consécration par l’évêque Louis d’Amboise. C’est l’évêque d’Albi, Bernard de Castanet, qui décida de l’édifier en 1276.
On comprend qu’il ait fallu tout ce temps quand on voit ses dimensions imposantes :113,50 m de longueur, 35m de largeur hors d’œuvre, 30m de hauteur.
Il s’agissait de manifester l’orthodoxie religieuse d’où son apparence d’une immense forteresse de brique, d’une architecture de style gothique si originale qu’elle n’a pas fait école et reste unique dans le monde.
L’originalité architecturale tient d’abord à son plan, une vaste salle rectangulaire qui s’arrondit à l’abside et se dilate à l’intérieur grâce à la présence de chapelles entre les contreforts. Habituellement, dans l’architecture gothique, les murs très élevés reposent sur des arcs-boutants, comme on peut l’observer sur Notre-Dame d’Alençon ou la cathédrale de Sées, par exemple, et quasiment tous les édifices gothiques. Ici, il n’y a pas d’arcs-boutants.
À l’intérieur, à une hauteur de 30 m, les voûtes très bombées retombent sur des contreforts intérieurs ; à l’extérieur, les murs s’arrondissent à intervalles réguliers pour dissimuler les contreforts et sont percés de fenêtres qui prennent l’aspect de meurtrières.
On est frappé par une autre beauté singulière, surprenante : le contraste entre ces hauts murs de brique rose et le porche d’entrée, en forme de baldaquin, richement sculpté, aux fines ciselures de style gothique flamboyant comme dans le porche de Notre-Dame d’Alençon. On est frappé aussi par le dépouillement extérieur : hormis le baldaquin et les gargouilles, l’ensemble
est nu et lisse, la brique rose est d’autant mieux mise en valeur.
À l’intérieur, la profusion des sculptures et peintures contraste avec la nudité extérieure. On découvre un fabuleux ensemble artistique datant des XVe et XVIe siècles.
Les fresques de la voûte (1509-1512) constituent l’ensemble le plus vaste et le plus ancien de peintures italiennes de la Renaissance réalisées en France. Les couleurs, d’une fraîcheur incomparable, n’ont pas bougé depuis le XVIe siècle ! Elles n’ont jamais été restaurées ! La couleur du fond est le « bleu de France » dit aussi « bleu-roi » qui ne provient pas du pastel (plante cultivée dans la région, qui a fait la fortune de Toulouse au XVIe siècle, et donnait ce bleu pâle dit « bleu pastel »), mais probablement de lapis lazuli et oxyde de cuivre. Les matériaux de qualité à la base de la peinture et la brique, matériau support, expliquent cet excellent état de conservation.
Le jubé et la clôture du chœur (1477-1484) offrent une statuaire prodigieuse. Aux statues représentant les douze apôtres à l’intérieur du chœur correspondent, à l’extérieur, douze statues représentant des personnages de l’Ancien Testament. Cette disposition a une fonction pédagogique et symbolique. Elle évoque le lien entre l’Ancien et le Nouveau Testament, chaque personnage de l’Ancien testament annonce, symboliquement, un apôtre du Christ. Le jubé et la clôture du chœur sont sculptés dans le style gothique flamboyant qui rappelle le baldaquin du porche. La plupart des jubés ayant été détruits au XVIIe siècle, au moment de la Contre-Réforme, celui-ci est une œuvre rare.
La porte d’entrée du chœur, sous le jubé, en bois de chêne sculpté, comporte des motifs d’ornementation caractéristiques de l’époque gothique tardive, tel le « pli de serviette », et une ferrure très riche, avec le tissu d’étamine (tissu de laine cardée rouge) posé entre la platine et les reliefs de fer forgé sculpté.
Enfin, sous l’orgue, se trouve la merveille, le plus grand Jugement dernier du monde (1474-1484) peint sur des piliers. Il se déploie sur trois registres : le ciel, la terre et l’enfer.
Le registre supérieur représente les justes et le Christ dans le ciel. Le registre médian évoque la terre, il est en partie non figuratif, avec des espaces dans des tonalités sombres qui ont pour fonction de bien marquer la séparation entre le ciel et l’enfer. Le registre inférieur, le mieux visible, représente les supplices liés aux sept péchés capitaux, en enfer.
Sainte-Cécile d’Albi est bien une perle du patrimoine français et mondial, d’autant plus qu’elle est l’une des rares églises et l’unique cathédrale dédiée à Sainte Cécile de Rome, patronne des musiciens. La musique y est toujours à l’honneur, d’ailleurs, grâce au superbe orgue du XVIIIe siècle.
Élisabeth Bart
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