26 avril 2014 Sortie itinéraire du Patrimoine à Essay
Patrimoine bâti et histoire locale
à Essay (Orne)
Photo journal Ouest-France du 28 avril 2014
Les Amis du Patrimoine de Cerisé en visite à Essay
Ci-dessous; les commentaires et photos
de Jean-Nicolas BART et Yves BULTEL.
Une douzaine de passionnés du patrimoine bâti et de l’histoire locale sont venus au rendez-vous à Essay, Place Valazé ; nous y avons été accueillis par Isabelle d’Harcourt, propriétaire de la chapelle ducale et de l’emplacement du château. Nous sommes alors en bordure de la ville close telle que, jouxtant le château, elle a été voulue et réalisée par les comtes puis ducs d’Alençon, membres de la branche Valois des rois de France à la fin du moyen-âge.
Enceintes castrale et urbaine d'Essay
A cette époque, la Guerre de cent ans redonne un intérêt stratégique à ce promontoire que les seigneurs de Bellême avaient, au XIe siècle, déjà coiffé d’une fortification.
Une vingtaine de mètres plus bas, la rivière Vézonne contourne ce promontoire qui permettait de surveiller et de contrôler cette partie de la Plaine d’Alençon, à la frontière sud de la Normandie des XIVe et XVe siècles, riche et convoitée par Français et Anglais. Nous aussi, lorsque nous nous hisserons au sommet de l’éperon, nous balaierons du regard les campagnes de l’ancienne vicomté d’Essay, cernée par les hauteurs forestières de Bourse, de Perseigne et d’Ecouves.
En cette fin du moyen-âge, Essay juxtapose, en étroite relation, le château ducal avec son enceinte fortifiée et, à ses côtés, la ville ducale elle-même remparée : la distinction des 2 implantations correspond à la distinction de 2 types de fonctions (politique, administrative et militaire d’un côté, économique de l’autre), distinction qui est habituelle au moyen-âge ; l’implantation sur un promontoire du bâti de ces fonctions donne au site d’Essay un air de famille avec, par exemple, les paysages du bâti d’origine médiévale de Domfront et de Sainte-Suzanne.
De la place Valazé, nous pénétrons dans la ville close par le portail d’une propriété construite au 17e siècle ; ce portail est pris dans la contrescarpe (mur extérieur du fossé défensif à l’époque médiévale).
Fossé
Les fossés de l'enceinte urbaine sont imposants par leur largeur. Nous voyons un chemin de ronde au mur intérieur du fossé (sur la première photo)
Puis nous gagnons le Châtelet,
avant poste de l’ancien château pour arriver sur l’esplanade à l’extrémité de l’éperon où, de l’ancien château, ne subsiste au-dessus du sol que la chapelle des Ducs d’Alençon,
La chapelle Marguerite de Lorraine
Façade d'entrée (orientée sud ouest)
dite chapelle Marguerite de Lorraine. Nous admirons au passage la beauté et l’ordonnancement d’un jardin d’inspiration médiévale dessiné par le paysagiste Alain Richert, où les « simples » (plantes médicinales et/ou aromatiques) et les fleurs d’ornement (œillet, iris, centaurée, pervenche, euphorbe à fleurs jaune, etc.), invitent à la contemplation, à la poésie courtoise, aux plaisirs des cinq sens.
La structure de la chapelle est du XIVe siècle, époque où Pierre II, comte d’Alençon et du Perche, fait renaître l’ancien château par d’importants travaux. Le bâtiment est imposant par sa hauteur et par ses deux grandes verrières gothiques sur la façade principale orientée sud-ouest. Il a fallu refaire entièrement ces verrières après la tempête de décembre 1999 qui a mis à bas les vitrages et leur dentelle de pierre. La chapelle était flanquée de chaque côté des bâtiments du château, l’aile nord ouest la plus vaste destinée à la résidence seigneuriale.
Emplacement des fondations de l'aile résidentielle du château
Cette chapelle à nef unique a deux niveaux, disposition réservée aux chapelles édifiées par des membres de la famille royale. Le niveau supérieur, comprenant la grande tribune et les deux galeries latérales des murs gouttereaux, était réservé aux nobles. Ils pouvaient y accéder par une coursière qui communiquait avec les appartements seigneuriaux de l’aile latérale nord ouest du logis.
Schéma de l'emplacement de l'aile résidentielle du château
Le rez-de-chaussée de la nef accueillait toutes les autres personnes.
L’intérieur de la Chapelle avec ses tribunes, son escalier à vis, en bois, de très belle facture, est lumineuse.
Intérieur de la nef de la chapelle
Nous quittons la chapelle pour descendre un chemin abrupt, la dénivellation du terrain remplaçant ici le fossé dans son rôle défensif. Au pied de l’éperon, au moyen-âge, la rivière Vézonne avait été aménagée en une succession d’étangs maintenant hors d’eau pour accroitre la capacité défensive du site. Au pied de la pente et au bord des anciens étangs, le sentier enherbé nous amène à un ancien lavoir très bucolique.
En remontant vers la vieille ville par le côté nord, nous retrouvons la chapelle, dont
la toiture sort des frondaisons.
La visite se poursuit en traversant la ville close aux maisons jointives orientées avec leurs murs-pignons en façade sur rue. Ici se succédaient maisons et boutiques.
Puis, descendant la rue du Fossé Capitaine,
nous traversons la Vézonne,
nous gagnons le quartier de l’ancienne Abbaye royale Sainte-Madeleine construite à la fin du 15e, mais démolie pendant la Révolution. Pour témoigner de cette troisième partie (non fortifiée) de l’ancienne ville subsistent la maison de l’Abbesse et la porte d'entrée du couvent
Nous pénétrons enfin dans l’église paroissiale Saint-Pierre et Saint-Paul.
Eglise Saint-Pierre et Saint-Paul
Son architecture est complexe : une tour d’entrée double à deux clochers, avec un porche roman, une nef du 17e siècle, un chœur à l’origine du 11e siècle, mais qui a été repris à l’époque gothique puis au moment de la Contre-Réforme. Ce chœur présente au nord un vitrail dédié à Jeanne d’Arc représentant le duc d’Alençon Jean II soutenant son soldat blessé le mieux connu, la future sainte ;
Détail du Duc d'Alençon Jean II soutenant Jeanne blessée
au sud un autre vitrail figure sainte Marguerite de Lorraine, épouse du duc René puis duchesse pendant son veuvage. Entre le chœur et la nef, un jubé en boiseries et en fer forgé
a été conservé, tandis qu’une cuve baptismale du 12esiècle
a été installée dans la nef. Elle provient de l’église d’Echuffley, paroisse rattachée à Essay en 1840.
Cette visite d’Essay, très complète, nous a permis d’avoir une vue d’ensemble de l’évolution du bâti d’Essay au cours des siècles, depuis les Bellême jusqu’à nos jours. Nous en avons retenu, en particulier, la période faste des Valois d’Alençon dont il reste heureusement la chapelle des ducs, les guerres de religion qui entraînèrent la perte du château, et la Révolution qui supprima toute l’abbaye royale. L’église paroissiale a traversé toutes les époques depuis le XIe siècle mais avec beaucoup de remaniements architecturaux.
C’est assez pour témoigner du passé de ce qui fût une ville, dans ce qui n’est plus maintenant qu’un petit village.
Un grand merci à Madame Isabelle d’Harcourt pour cette visite guidée d’une grande qualité.
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 10 autres membres